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de la veuë de la Princesse, qu’il espera d’obtenir ; il demanda pardon à Artamene, de l’injuste priere qu’il luy avoit faite. Et comme mon Maistre luy dit, qu’il connoistroit bien tost par les foins qu’il prendroit pour sa liberté, qu’il faisoit tousjours tout ce qu’il croyoit devoir faire : ce Prince amoureux le pria de ne se haster pas tant : car, luy dit-il, genereux Artamene, je doute si je n’aime point encore mieux estre prisonnier à Sinope, que d’estre libre sur le Throsne de Pont & de Bythinie.

Apres cela, Artamene quitta ce Prince, avec beaucoup de chagrin : & presque aussi affligé, que si Mandane eust pû entendre tout ce que le Roy de Pont venoit de luy dire : & qu’elle en eust paru fort touchée. Au sortir de là il fut chez le Roy, qui le carressa fort, & qui se mit à l’entretenir assez long temps en particulier : il luy dit qu’il luy devoit toute la gloire de son regne : & luy exagera en suitte, toutes les faveurs qu’il avoit reçeües du Ciel. Il luy repassa alors son mariage, avec la Reine de Capadoce : tous les démeslez qu’il avoit eus, avec les Princes ses voisins, dont il estoit sorty heureusement : son bonheur d’avoir eu une Princesse pour fille, aussi accomplie que Mandane : & enfin il luy raconta exactement, tout ce que les Mages avoient dit, à la naissance du fils du Roy de Perse. Les menaces qu’ils avoient faites à toute l’Asie, & particulierement au Roy des Medes : combien Astiage en avoit esté troublé : & quelle avoit esté sa joye, lors qu’on l’avoit assuré que Cyrus avoit esté noyé. Mais Artamene, luy dit il alors, vous devez aussi vous resjoüir de sa perte : & venir demain au Temple, pour offrir aveque nous le Sacrifice que l’on fait tous