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des Ambassadeurs à Ciaxare pour la luy demander en mariage. Vous avez aussi sans doute sçeu, que ce Prince me la refusa, parce que j’estois Estranger : luy, dis-je, qui n’a pas esté assujetty si rigoureusement à cette loy de l’Estat : qui ne peut mesme estre observée en l’occasion qui se presente, puis qu’il n’y a point de Prince en Capadoce, qui puisse espouser Mandane. Sçachant donc toutes ces choses, genereux Artamene, je ne m’arresteray pas à vous les dire avec exactitude : & je vous suplieray seulement, de vouloir m’assister de vos conseils, au malheureux estat où je me trouve. Mais afin que vous le puissiez mieux faire, il faut que je vous ouvre mon cœur : que je vous advouë que j’aime tousjours passionnément la Princesse Mandane : & que tout vaincu que je fuis, je ne puis m’empescher de desirer quelquefois, de pouvoir regner dans son cœur. Dites moy donc de grace ce que je dois devenir ; ce que je dois esperer ; & si l’illustre Artamene, par sa faveur, par sa generosité, & par son adresse, ne pourroit point me donner les moyens de fléchir Ciaxare ; d’adoucir l’esprit de Mandane ; & de me faire vaincre dans les fers. je sçay bien, adjousta t’il, que ce que je dis paroist sans fondement comme sans raison : mais que voulez vous que face un homme amoureux & passionné ? qui n’a que faire de la liberté sans Mandane ; & qui ne veut pas mesme de la vie, sans la permission de l’aimer. Qui ne sçauroit songer à la paix, ayant une si cruelle guerre dans son cœur : ny à parler de rançon à un Prince, avec lequel il ne peut faire aucun Troitté sans Mandane. je sçay bien, adjousta-t’il encore une fuis, que je suis injuste de vous parler ainsi : mais genereux Artamene, si vous avez