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qu’ils se missent en estat de s’opposer à ses desseins. Mais il fut estranggement estonné, lors qu’il vit ce Chasteau sans Garnison ; & que ces quatre mille hommes n’estoient plus campez aupres. Il sçeut seulement, qu’en effet Philidaspe y avoit esté : mais qu’il en estoit sorty la derniere nuit ; & qu’à trente stades de là, il avoit fait desbander toutes ses Troupes ; & estoit allé peu accompagné, vers une Forest qui n’estoit pas fort esloignée. Artamene y fut ; y chercha par tout ; & envoya plusieurs petits Corps separez à l’entour de cette Forest pour en prendre des nouvelles : toutefois il ne pût jamais rien trouver que des Soldats qui fuyoient, & qui ne sçavoient autre chose, sinon que depuis long temps Philidaspe avoit apporté un grand soing à se faire aimer de ces Troupes la : & que depuis quelques jours, ils sçavoient qu’il avoit eu intention de les employer en une occasion importante. Artamene voyant donc qu’il ne pouvoit rien aprendre davantage, s’en retourna à Sinope, pour y rendre conte au Roy & à la Princesse de ce qu’il avoit fait : Cependant l’on ne laissa pas de se tenir tousjours sur ses gardes : & de bien observer tous ceux qui avoient quelque commandement dans les Troupes on dans la Ville. Apres tant de tumulte & tant de trouble, Artamene s’estant trouvé seul dans son Cabinet, se mit à repasser dans sa memoire, ses dernieres avantures : & à s’affliger sensiblement, de cette extréme fierté, qu’il avoit remarquée dans l’esprit de la Princesse, lors quelle avoit apris l’amour de Philidaspe pour elle. Que feray-je, disoit il : & que pourray-je esperer d’une personne, qui parle du plus puissant Prince d’Asie avec tant d’orgueil ? Toutefois, reprenoit il