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vouloir ce qui vous plaist : & perdre une seconde fois un Fils, que je pensois avoir retrouvé. Ne vous offensez pas de grace, de la ressemblance qu’il a aveque vous : car de quelque condition que vous puissiez estre, son Nom ne vous sçauroit estre honteux : puis que ses Peres en perdant la Couronne de Bythinie, luy ont au moins laissé la noblesse de leur sang. Madame, luy dit alors Artamene, je vous demande pardon, si je ne vous ay pas rendu tout le respect que je vous devois : Ne vous excusez point, dit elle, d’une chose où vous n’avez point failly : & puis, adjousta cette Dame en soupirant, des Princesses qui vivent sous la domination d’un Usurpateur ; ne font pas en termes d’exiger si regulierement, tout ce que l’on devroit peut-estre à leur condition dans un autre temps. Quoy qu’il en soit, poursuivit elle, si vous n’estes pas mon Fils, vous luy ressemblez ; & par cette seule raison, je me trouve obligée de vous rendre la liberté. Si vous estiez mon Fils, vous ne feriez pas en seureté dans cette Maison ; & ne l’estant point, vous n’y feriez pas non plus en asseurance. Ainsi il vaut mieux que vous en partiez : & que vous me disiez où vous voulez que je vous face conduire. Mon Maistre ravy de joye de la generosité de cette Dame, la remercia : & luy protesta qu’il la serviroit toute sa vie ; & peut estre plus importamment qu’elle ne croyoit. En suitte de quoy il la pria de luy vouloir presser une Lictiere, pour le reporter au Camp de Ciaxare. Mon Maistre n’estoit pas encore trop bien : mais l’amour luy redonnant de nouvelles forces, pour pouvoir retourner vers le lieu où il sçavoit qu’il entendroit parler de Mandane, il voulut partir dés le lendemain : & partit en effet, accompagné du jeune Chirurgien qui l’avoit pensé ; &