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Fortune ne m’a eſté favorable, que pour m’eſtre plus inhumaine, puis qu’elle ne m’a eſlevé, que pour me precipiter ? Où au contraire, nous verrons qu’elle n’a affligé mon Rival, que pour luy faire mieux ſentir la joye : & qu’elle ne l’aura abaiſſé, que pour l’eſlever plus haut. En effet, ne remarquez vous pas deſja, que le malheur commence de luy eſtre avantageux, & de luy produire un bien ? & qu’au contraire, la bonne fortune me cauſe un mal tres ſensible. Car enfin, la priſon j’aproche de ce qu’il aime : & la liberté m’eſloigne de ce que j’adore. Il y a deſja ſi longtemps, reprit Chriſante, que cét Oracle a eſté rendu ſans qu’il ſoit arrivé de fort grand bonheur à ce Prince, qu’il ne me ſemble pas qu’il faille faire un ſi grand fondement là deſſus : ha Chriſante ! s’eſcria Cyrus, c’eſt que vous ne connoiſſez pas la paſſion qui me poſſede : ou que peut-eſtre vous deſguisez vos ſentimens pour me conſoler. Le moyen, adjouſta-t’il, de ne ſe croire pas perdu, apres une opiniaſtreté de malheurs ſi eſpouvantable, & apres que les Dieux ont reſolu ma perte ? haſtez vous du moins, juſtes Dieux (dit-il en levant les yeux au Ciel) & ne me forcez pas malgré moy à perdre le reſpect que je vous ay touſjours rendu. Comme il en eſtoit là, on luy vint dire qu’Artabaſe arrivoit, qui venoit de la part du Roy de Phrigie. Helas, dit Cyrus en ſoûpirant, ce Prince ne sçait pas que mon malheur eſt contagieux pour luy, & que ſon illuſtre Fils eſt bleſſé & priſonnier ! Apres cela, ayant commandé qu’on fiſt entrer Artabaſe, & luy ayant demandé ce qu’il venoit faire ? il luy dit que le Roy de Phrigie l’avoit envoyé en diligence, pour luy dire que les Amis de Menecée, &