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nuit avec impatience : pour voir s’il ne trouveroit point les voyes de les conduire au Chaſteau d’Hermes, afin d’adviſer en diligence, ce qu’on pourroit faire pour l’illuſtre Cyrus, de qui la priſon leur donnoit tant d’inquiétude. Durant qu’ils eſtoient en cét eſtat, ils entendirent quelque bruit, & ils creurent meſme qu’ils alloient eſtre deſcouverts : mais par bonheur il ſe trouva, que c’eſtoit Artabaſe & Aduſius, qui cherchant à ſe cacher, les rencontrerent. La joye qu’ils eurent de ſe revoir, fut pourtant bien traverſée : lors que de part & d’autre ils ſe rendirent conte de ce qui eſtoit arrivé à l’endroit où ils avoient combatu. Car Ligdamis aprenant à Artabaſe, que Cyrus avoit eſté pris, le deſespera eſtrangement ; & Aduſius aprenant en fuite à Tigrane, que le Roy d’Aſſirie l’eſtoit auſſi, & à Ligdamis que le Prince Artamas eſtoit bleſſé & priſonnier tout enſemble ; ils n’eurent plus rien à faire, qu’à meſler toutes leurs douleurs. Mais enfin la nuit eſtant venuë, & Ligdamis, qui sçavoit tous les détours du Bois, eſtant allé deſcouvrir s’il eſtoit ſeur pour eux de s’en retourner : trouva en effet qu’il n’y avoit plus perſonne, & que toutes les Troupes eſtoient paſſées. Si bien que ſans perdre temps, il fut querir ſes Amies, & les remena heureuſement au Chaſteau d’Hermes : où ils eurent la conſolation de trouver l’illuſtre Cyrus, qui s’y eſtoit arreſté pour y paſſer la nuit : bien eſt-il vray qu’ils le trouverent ſi triſte, qu’ils furent obligez de cacher une partie de la joye qu’ils avoient de l’avoir retrouvé. La veuë de Mandane captive, avoit de telle ſorte eſmeu ſon cœur, qu’il n’avoit pas ſenty le plaiſir que la liberté donne, à tous ceux qui la recouvrent : au contraire, lors