repliqua-t’il, me rend ſi heureux, que s’il eſt vray que vous preniez part à tous mes ſentimens, vous ne devez plus avoir que de la joye : eſtant certain qu’après ce que je viens d’entendre, je mourray preſques ſans douleur. Il vaut mieux que vous ſongiez à vivre qu’à mourir, reprit-elle, quand ce ne ſeroit que pour l’amour de moy, qui ne pourrois vivre ſans vous. Palmis profera ces favorables paroles, par un emportement d’affection qui la fit rougir, dés qu’elle les eut prononcées : & qui l’obligea de tourner la teſte, pour voir ſi perſonne ne les auroit entenduës. De ſorte que voyant derrière elle la Princeſſe Mandane, & toutes les Femmes qui les acconpagnoient, elle luy demanda pardon d’oublier la civilité qu’elle luy devoit. Artamas connoiſſant par là que ce devoit eſtre Mandane, luy fit un compliment qui fit bien connoiſtre à cette Princeſſe, qu’il sçavoit que la paſſion de Cyrus eſtoit tres violente : mais comme il ne sçavoit pas l’advanture de ce Prince, il en alloit parler comme le croyant priſon nier, ſi Palmis ne luy euſt fait ſigne qu’il ſe teuſt, & ne l’euſt interrompu, pour luy demander comment il ſe trouvoit, & s’il pourroit bien ſouffrir l’agitation du Chariot ; Cependant Andramite s’ennuyant, & craignant meſme que l’indulgence qu’il avoit ne luy fuſt reprochée par Creſus, s’il venoit à la sçavoir, ſuplia la Princeſſe adroitement, pour ne l’irriter pas, de ſouffrir que l’on priſt un de ſes Chariots pour le Prince Artamas" qui avoit beſoin d’eſtre en lieu où il ſe pûſt repoſer. Quoy que cette Princeſſe connuſt bien que ce qu’il diſoit n’eſtoit pas la veritable raiſon qui le faiſoit parler, elle ne laiſſa pas de faire ce qu’il vouloit ; c’eſt à dire de ſe ſeparer d’Artamas. je
Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/628
Cette page n’a pas encore été corrigée