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diray point, Madame, tout ce que ſe dirent ces d’eux perſonnes, ny pendant le reſte de la converſation ; ny lors que Stenobée en noyant querir Cleonice, il falut ſe reparer : car je ne pourrois pas retrouver dans ma memoire, tout ce que l’amour leur inſpira. Ce n’eſt pas que la choſe fuſt eſgale entre eux : au contraire Cleonice aporta autant de ſoin à cacher l’excés de ſa douleur en cette ſeparation, que Ligdamis en aporta à luy monſtrer toute la ſienne. Mais quoy qu’elle fiſt, elle parut dans ſes yeux malgré elle : & ils me parurent ſi touchez l’un & l’autre, que j’eus grande part à leur affliction.

Apres que Cleonice fut partie, Ligdamis fut encore aſſez long-temps avecque moy, à me parler touſjours d’elle, & à me prier de continuer à luy rendre office : mais en fin eſtant extraordinairement tard, il me quitta, avec intention d’aller paſſer le reſte de la nuit chez un homme qui eſtoit à luy il y avoit environ un an : & d’en partir dés qu’il commenceroit de faire jour. Comme il croyoit que ce domeſtique eſtoit le plus fidelle ſerviteur du monde, & que depuis qu’il eſtoit à ſon ſervice il n’avoit pas fait la moindre faute, & c’eſtoit à luy qu’il s’eſtoit confié de ſon voyage : mais, Madame, il faut que vous sçachiez que cét homme ſi fidelle en aparence, eſtoit un eſpion d’Hermodore : d’Hermore, dis je, qui ſans en teſmoigner rien ouverte ment, ne laiſſoit pas de faire toutes choſes poſſibles pour deſtruire Ligdamis, & pour eſpouser Cleonice. De ſorte qu’ayant eſté adverty par ſon Agent, que Ligdamis eſtoit à Epheſe deſguisé ; qu’il eſtoit dans ſa maiſon ; & qu’il avoit eſté chez moy avec Cleonice, Hermodore, apres avoir bien examiné ce qu’il avoit à faire, envoya ſix hommes