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de la galanterie. Car enfin, Ligdamis, vous en sçavez allez pour n’ignorer pas, que c’eſt la premiere marque d’amour que l’on donne. Quoy qu’il en ſoit, adjouſta-t’elle en raillant touſjours, ſi par hazard je vous bleſſe malgré que vous en ayez, comme je sçay que vous n’aimez pas la preſſe, je vous promets de rompre les chaines de plus de ſix de mes Eſclaves pour l’amour de vous. Ils s’eſtiment ſi heureux, luy dis-je, de porter vos chaines, qu’il vaut mieux les laiſſer dans vos fers que de m’en accabler. Je ne vous verray pourtant jamais en particulier, me dit-elle, que je ne m’informe de vous, quel progrez j’auray fait dans voſtre cœur. Voila donc Madame, pourſuivit Ligdamis, quelle fut la converſation d’Artelinde & de moy : à trois jours de là, l’ayant rencontrée en un lieu où elle monſtra des Vers de la fameuſe Sapho, qu’on luy avoit envoyez de Mytilene ; je la priay de me les preſter, mais elle ne le voulut pas ; me diſant ſeulement qu’elle me les envoyeroit : & en effet elle me les envoya le ſoir, avec une Lettre, dont celle que vous tenez eſt la reſponce. Il faudroit ce me ſemble (dit Cleonice apres avoir paiſiblement eſcouté Ligdamis) que je viſſe cette Lettre, pour pouvoir croire ce que vous dites : il ne ſera pas difficile, adjouſta-t’il, car je penſe avoir deſſigné quelque choſe ſur le coſté qui n’eſt point eſcrit, pour la fortification d’Epheſe, dont l’illuſtre Cleandre m’a chargé. Vous ne voulez pas dire, reprit Cleonice, que vous l’avez conſervée par affection : je ne le veux pas en effet, dit il, car je me tiendrois deſhonnoré, ſi j’avois la moindre tendreſſe pour Artelinde, bien loin d’avoir de l’amour. Cependant, Ligdamis ſans perdre temps, envoya un