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beaucoup de reſpect, Seigneur, luy dit-elle, vous m’avez autreſfois ſi bien accouſtumée à ſouffrir d’injuſtes reproches, que je n’en ay pas encore perdu l’habitude. Infame, luy dit-il, appelles tu d’injuſtes reproches, ceux que je te faits preſentement ? d’avoir creû ma mort dés qu’on te l’a dite ; de ne l’avoir pas pleurée ; etde te trouver comme je fais le viſage couvert de larmes, pour l’abſence de ton Amant. Car sçaches qu’il y a deſja ſix jours que je ſuis caché dans Ecbatane, en un lieu où j’ay sçeu ton pretendu Mariage, & toutes tes mauvaiſes actions. J’eſtois venu icy pour tuër Aglatidas devant tes yeux, me doutant bien qu’il y viendroit : mais eſtant arrivé trop tard, à ce que j’ay apris en entrant, je ne trouve plus que toy ſur qui je me puiſſe vanger. Seigneur, reprit Ameſtris, puis que vous dites sçavoir tout ce que j’ay fait, vous sçavez donc bien que dés que Dinocrate m’a eu dit qu’Aglatidas ſans y penſer vous avoit tué à la guerre, j’ay rompu avecques luy. Ouy devant le monde, repliqua le furieux Otane, mais non pas en particulier : car ſi cela eſtoit autrement, tu ne l’aurois pas reveû icy. Je vous aſſure, dit Menaſte, qu’Aglatidas s’en va avec un ordre exprés d’Ameſtris, de ne la revoir jamais : & je vous aſſure, reſpondit Otane, que je viens avecques le deſſein d’empeſcher en effet qu’il ne la revoye pas, & qu’elle ne vous voye non plus que luy. De vous dire, Seigneur, tout ce que dit Otane, ce ſeroit abuſer de voſtre patience : mais je vous diray ſeulement, que tout ce que la jalouſie, la rage, & le deſespoir peuvent faire dire, il le dit en cette occaſion ; & contre Ameſtris, & contre Aglatidas, & contre Menaſte. En ſuite dequoy. Faiſant atteler un Chariot, il la contraignit de s’en retourner