qu’elle croyoit qu’il ne ſeroit pas aiſé d’obtenir d’elle qu’elle viſt Aglatidas : que neantmoins elle y feroit ce qu’elle pourroit. Nous fuſmes apres cela aſſez long temps à admirer cette bizarre rencontre : & à nous en affliger ; pour l’intereſt des perſonnes que nous aimions. Cependant Anatiſe qui vouloit jouir pleinement de ſa fourbe, revint à Ecbatane : & y fit courir le bruit qu’Aglatidas avoit bien sçeu qu’il avoit tué Otane : adjouſtant meſme qu’Ameſtris ne l’avoit pas ignoré. Cette derniere choſe ne fut pourtant cruë de perſonne : mais comme Ameſtris aporta ſoin à s’informer de ce que l’on diſoit par la Ville ; sçachant toutes ces impoſtures, elle ſe confirma ſi puiſſamment dans la reſolution de n’eſpouser point Aglatidas, & de ne le voir jamais ; que Menaſte ne pût meſme obtenir d’elle qu’il allaſt luy dire ſes raiſons : de ſorte qu’il falut ſonger à la tromper, & à taſcher de le luy faire voir ſans qu’elle en euſt le deſſein. Ce n’eſt pas qu’elle ne l’aimaſt touſjours, avec une tendreſſe extréme : mais c’eſt que la gloire eſtoit la plus ſorte dans ſon cœur. Cependant durant qu’Aglatidas & Ameſtris eſtoient ſi malheureux, Anatiſe & Tharpis ſe reſjouissoient de leurs infortunes : Megabiſe & Artemon en eſtoient auſſi bien aiſes ; & afin de porter la fineſſe auſſi loing qu’elle pouvoit aller, Anatiſe fit dire à Ameſtris par une voye fort deſtournée, qu’on la loüoit infiniment de la reſolution qu’elle ſembloit prendre de n’eſpouser point Aglatidas, & meſme de ne le voir plus : de ſorte que cette belle Perſonne parla ſi déterminément à Menaſte, qu’elle n’eſpera plus du tout de la pouvoir jamais vaincre.
Trois ou quatre jours ſe paſſerent de cette ſorte ; mais enfin Menaſte feignant de ſe trouver aſſez mal, pour obliger Ameſtris