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fus contraint de l’y laiſſer, & d’en arracher une des mains d’une autre des ennemis dont j’eus le bon-heur de me ſaisir un moment apres. Ha Aglatidas, dit Ameſtris, que m’aprenez-vous ! comme il ne sçavoit pas pourquoy Ameſtris parloit ainſi, ny pourquoy cette autre Dame luy avoit parlé de cette Eſpée qu’il avoit perduë, ny comment elle avoit sçeu qu’il l’avoit perduë : il ſe tourna vers moy, & je luy dis que Dinocrate aſſuroit qu’il avoit ſon Eſpée : & qu’il l’avoit retirée du corps de ſon Maiſtre. Elle eſt ſi connoiſſable, dit Aglatidas, que l’on ne s’y sçauroit tromper : car je penſe qu’il n’y a pas un de mes Amis qui ne la connoiſſe. Mais ou eſt elle ? adjouſta-t’il. Seigneur, repliqua Dinocrate, s’il vous plaiſt je vous l’envoyeray querir, & vous la feray voir dans cette Antichambre. Aglatidas l’en ayant preſſé : il ſortit : pendant quoy regardant Ameſtris qui n’oſoit preſques plus le regarder. Madame luy dit-il, je voy bien que ſi Dinocrate me fait voir mon Eſpée, & qu’il perſiste à dire qu’il l’a tirée du corps de ſon Maiſtre, je ne pourray pas vous faire voir bien clairement que je n’ay pas tüé Otane ; puis que j’ay advoüé avec ingenuité, que j’avois laiſſé mon Eſpée dans le corps d’un homme qui eſtoit du meſme Party dont Otane eſtoit : & qu’ainſi il ſemble que cela ſoit fort. Mais apres tout, Madame, je ne laiſſe pas de croire que tout ce que Dinocrate dit eſt faux : il vous a touſjours eſté contraire en toutes choſes : il eſt Frere d’une Fille qui ſert chez Anatiſe : & tout ce qui part de ſa bouche doit eſtre ſuspect. Mais enfin Aglatidas, dit Ameſtris, par voſtre propre confeſſion, vous avez laiſſé voſtre Eſpée dans le corps d’un homme mort ; Dinocrate dit que cét homme eſtoit Otane : & vous n’avez