qu’il n’y va pas moins de ma vie que de la preuve de voſtre innocence. C’eſt pourquoy, Madame, reſolvez vous, s’il vous plaiſt, à ne chercher point d’autre voye de vous juſtifier. Mais, Aglatidas, dit elle, je voy bien que par ce que vous me dites, je me juſtifierois peut eſtre aupres de vous : mais dans l’eſprit du monde, je ne voy pas que cela fuſt. Je ſuis pourtant aſſeuré, Madame, reſpondit-il, que voſtre vertu eſt ſi generalement connuë ; que ſi l’on sçavoit que vous euſſiez abſolument reſolu de me preferer à tous ceux qui ont de l’amour pour vous, on ne vous ſoupçonneroit pas d’avoir une galanterie particuliere avec Megabiſe. Auſſi bien, Madame, faut-il que je vous advouë, que la paſſion que j’ay dans l’ame, ne sçauroit plus ſouffrir que je vous voye eternellement ſans vous voir (s’il eſt permis de parler ainſi) eſtant certain que je n’apelle pas vous avoir veuë, quand j’ay paſſé une apreſdinée chez vous, au milieu de mes ennemis : Car, Madame, pourſuivit-il, c’eſt ainſi que les Amans qui ſont ſinceres apellent touſjours leurs Rivaux. Ne croyez donc pas, s’il vous plaiſt, que je die cela par une jalouſie capricieuſe : non, Madame, c’eſt par un pur ſentiment d’amour : puis qu’encore que la preſence de mes Rivaux m’importune beaucoup plus que celle des autres gens ; il eſt pourtant vray que quand on aime avec violence & avec tendreſſe, on ne trouve jamais avoir entierement joüy de la converſation de la Perſonne que l’on adore, lors qu’on la partage avec quelqu’un. Menaſte meſme, luy dit-il, m’importune quelqueſfois, quoy que je ne vous diſe rien en particulier, que je. ne puſſe vous dire en ſa preſence : mais c’eſt, Madame, que l’amour
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