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me déplaire, vous ne me verrez plus jamais : ou ſi je ne puis abſolument l’eſviter, vous ne me verrez qu’en chagrin & qu’en colere. Mais Madame, luy dit-il, eſt il poſſible que vous ayez pû vous refondre à eſpouser Otane, & à quiter Aglatidas, pour lequel ſeul vous me banniſſiez, & que vous ne veüilliez pas ſeulement eſcouter aujourd’huy les pleintes d’un malheureux, que vous euſtes la bonté de flater de quelques douces paroles en le banniſſant ? Vous luy dites qu’il pouvoit pretendre à voſtre eſtime & à voſtre amitié : & que ſi vous n’euſſiez pas eſté engagée par les commandemens d’un Pere, & par voſtre inclination, à preferer Aglatidas à tout le reſte du monde ; il n’auroit pas eſté meſprisé. Depuis ce que je dis, Madame, Aglatidas a parû avoir rompu vos chaines ; il a porté celles d’Anatiſe devant tout le monde : & vous avez pû eſpouser Otane. Dites moy de grace apres cela, ſi je n’ay pas quelque droit de vous demander une place dans voſtre eſprit, qu’Otane a occupée indignement (s’il eſt vray qu’il l’ait occupée) & dont Aglatidas s’eſt aſſurément rendu indigne par ſon inconſtance. De plus, Madame, quand meſme j’imaginerois qu’il n’auroit pas eſté effectivement amoureux d’Anatiſe, & qu’il auroit eu ordre de vous de feindre de l’eſtre : je ſoûtiendrois encore, qu’il ne vous auroit pas aſſez aimée, puis qu’il l’auroit pû faire : du moins sçay-je bien que je ne pourrois pas vous obeïr, ſi vous me faiſiez un ſemblable commandement. Obeïſſez ſeulement, repliqua t’elle, à celuy que je vous fais, de ne me parler plus de voſtre pretenduë paſſion, & de ne me viſiter meſme plus : & je ne vous en feray pas de plus difficiles. Si je ne vous avois point veû changer de ſentimens, reprit il, je vous obeïrois ſans