rité : & Artemon creut qu’Otane s’en alloit en Armenie, ſe jetter parmy les ennemis du Roy. Cependant Ameſtris luy dit, que pour commencer d’obeïr à ſon Mary, il faloit qu’il s’en retournaſt : il fit tout ce qu’il pût, pour l’obliger à ſouffrir qu’il la remenaſt à Ecbatane : mais outre que elle ne le voulut pas, il eſt encore vray qu’il ne l’euſt pas pû faire : car celuy qu’Otane avoit mis dans ce Chaſteau, eſtoit un homme opiniaſtre & abſolu, qui ne l’euſt pas enduré. Neantmoins la douceur d’Ameſtris obtint enfin de luy comme une grace ſinguliere, que Menaſte la pourroit venir voir : ainſi voyla Ameſtris, apres qu’Artemon fut : party, dans une ſolitude affreuſe ; principalement parce qu’elle n’avoit point de terme limité. Ses Parens luy firent offrir à diverſes fois de l’enlever de là, malgré la reſistance de celuy qui la gardoit, ſi elle y vouloit conſentir, mais elle ne le voulut jamais : non pas tant à mon advis pour obeïr à Otane, à qui elle ne devoit pas ſans doute une pareille obeïſſance : que pour ſuivre ſon humeur, qui faiſoit qu’elle ne pouvoit plus ſouffrir le monde, ſans ſe contraindre extrémement. A quelque temps de là, elle fut fort conſolée d’aprendre de certitude qu’Otane eſtoit en Armenie : car de cette façon elle craignit moins pour la vie d’Aglatidas : s’imaginant qu’il ne luy ſeroit pas ſi aiſé qu’il penſoit, de trouver au milieu d’un combat celuy qu’il alloit chercher, dans une armée de cent mille hommes.
Voila donc, Seigneur, de quelle ſorte veſcut Ameſtris, pendant la guerre d’Armenie : & juſques à la nouvelle qui s’eſpandit en Medie qu’Otane eſtoit mort. Elle y fut mandée avec tant de circonſtances, que perſonne n’eut peur de s’en reſjoüir ouvertement :