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Lettre de l’Armée, par laquelle on luy mandoit que Ciaxare & vous, eſtiez ſi irritez de ce qu’Otane avoit refuſé le Gouvernement qu’on luy avoit voulu donner, que l’on ne croyoit pas qu’il pûſt faire ſa paix aiſément. Or comme les nouvelles fâcheuſes à quelqu’un s’épandent toujours plus promptement que les autres, toute la Ville en vingt-quatre heures ne fut remplie que de celle-là : que l’on diſoit avoir eſté confirmée par quatre ou cinq Lettres, quoy qu’il n’en fuſt venu aucune. Si bien que par les eſpions qu’Otane avoit dans la Ville, il en fut bien-toſt adverty : ce qui augmenta ſes inquietudes à tel point, qu’il n’eſtoit pas maiſtre de luy meſme. Car comme on sçavoit alors à Ecbatane voſtre veritable condition, la faveur d’Aglatidas aupres de vous, luy devint plus redoutable, & redoubla ſon chagrin. En ce meſme temps on ſceut avec certitude que les affaires d’Armenie ne s’accommodoient pas : & qu’aſſeurément Ciaxare alloit porter la guerre en ce Païs là. De ſorte que pouſſé par un ſentiment de rage, de deſespoir, de vangeance, & de jalouſie tout enſemble ; il forma le deſſein de s’aller jetter dans le Party du Roy d’Armenie, quoy qu’il viſt aſſez que c’eſtoit aſſeurément perdre tout ſon bien : ſe flattant de l’eſperance de pouvoir rencontrer Aglatidas en quelque occaſion ; sçachant aſſez qu’il eſtoit aiſé de le trouver à la guerre, pourveû qu’on le cherchaſt aux endroits les plus dangereux. Ce deſſein eſtant pris, ſans le communiquer à perſonne, il envoya querir Ameſtris : qui contre l’advis de Menaſte luy obeït. Artemon qui eſtoit revenu à Ecbatane, sçachant la choſe, ne voulut du moins pas la laiſſer aller ſeule, & l’accompagna malgré qu’elle en euſt, Comme