homme entre les autres nommé Tharpis, qui pour punir Otane de ſa jalouſie, ſe reſolut de l’augmenter autant qu’il pourroit : Si bien qu’Ameſtris ne ſortoit jamais, qu’il n’y euſt de ſes gens à obſerver où elle alloit pour l’y ſuivre. Toutes les fois qu’Otane entroit ou ſortoit, il voyoit touſjours quelque Officier de Tharpis en garde à quelque coing de ruë proche de chez luy : ainſi je puis aſſurer ſans menſonge, qu’en fort peu de temps il ne fut gueres moins jaloux de Tharpis que d’Aglatidas : ou pour parler encore plus raiſonnablement, il le fut preſques eſgalement de tout le monde. Quand Ameſtris eſtoit malade, elle l’eſtoit toûjours de telle ſorte, & avec tant de violence, à ce que l’on diſoit à la porte de ſon logis, que l’on ne la pouvoit voir : & quand Otane l’eſtoit, il faiſoit dire auſſi qu’il l’eſtoit ſi fort, qu’Ameſtris ne le pouvoit pas quitter : de façon qu’ils ne ſe trouvoient jamais mal ny l’un ny l’autre, que l’on n’agiſt chez eux comme s’ils euſſent eſté à l’extremité. Si quel qu’un parloit bas à Ameſtris, à qui il n’oſast pas demander tout haut ce qu’il luy diſoit, il le leur demandoit apres à tous deux ſeparément : & ſe ſervoit pour cela de pretextes ſi bizarres, qu’il eſtoit impoſſible de n’en rire pas.
Voila donc à peu prés de quelle façon veſcut Ameſtris, juſques à la mort d’Aſtiage : qui comme vous l’avez sçeu, mourut en partie de douleur par la nouvelle qu’il reçeut, de l’enlevement de la Princeſſe Mandane. Mais quelques jours en fuite, sçachant que Ciaxare devoit venir à Ecbatane prendre poſſession de la Couronne de Medie, & que la Cour ſeroit fort groſſe : Otane s’imaginant meſme qu’Aglatidas pourroit revenir de ſes Voyages pour voir le nouveau Roy ; il remena Ameſtris