Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/280

Cette page n’a pas encore été corrigée

du moins chercher les voyes de faire sçavoir ſa ſouffrance à Ameſtris : c’eſt pourquoy, ſi vous m’en croyez, vous la ramenerez à Ecbatane. D’abord Otane trouva ce qu’Artemon luy diſoit fort raiſonnable : mais un moment apres il le deſaprouva : & Artemon partit avec Menaſte, ſans sçavoir ſi Otane demeureroit touſjours aux champs, ou s’il retourneroit à la ville, & ſans qu’Otane luy meſme sçeuſt ce qu’il vouloit faire. Cependant comme le prompt retour de Menaſte fit quelque bruit, & que par les domeſtiques des maiſons on sçait tout ce qui s’y paſſe, la jalouſie d’Otane fit une nouvelle rumeur dans le monde. De plus, Anatiſe ayant une Fille auprès d’elle qui eſtoit Sœur de Dinocrate Eſcuyer d’Otane & ſon confident, elle sçeut par luy que l’on avoit trouvé des Lettres d’Aglatidas entre les mains d’Ameſtris : de ſorte qu’Anatiſe entrant en une nouvelle fureur contre elle, dit cent choſes malicieuſes qui ne firent pourtant nul effet, & qui retournerent toutes contre elle meſme. Car il eſtoit ſi ais de voir qu’elle parloit avec animoſité, que ſi elle euſt pû dire vray, & parler mal d’Ameſtris, on ne l’euſt non plus creuë que lors qu’elle diſoit des menſonges. Pendant cela, Otane n’eſtoit pas peu occupé à garder les advenuës de ſa maiſon : s’il voyoit de loing un Païſan un peu propre traverſer un Bois qu’il avoit, il croyoit que c’eſtoit peut-eſtre Aglatidas déguiſé. S’il voyoit parler les Femmes d’Ameſtris à quelques gens qu’il ne connoiſſoit point, il vouloit sçavoir ce qu’on leur diſoit : & s’imaginoit qu’on leur avoit donné des Lettres d’Aglatidas pour leur Maiſtresse. Afin qu’elle ne pûſt gagner par des preſens celles qu’il mettoit auprès d’elle, il fit faire un rolle fort exact de toutes ſes