Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, quatrième partie, 1654.djvu/28

Cette page n’a pas encore été corrigée

ce n’euſt eſté qu’Abradate apres avoir eſté deffait, vint nous rejoindre, quelque temps devant que nous y fuſſions, ſuivi ſeulement de quinze ou vingt des ſiens. Cette veuë affligea ſensiblement le Roy de Pont : car il connut bien qu’Abradate avoit eſté attaqué & vaincu : mais lors qu’il l’eut joint, & qu’il luy eut apris que Panthée eſtoit priſonniere, il en eut une douleur extreſme. J’eſtois alors derriere ces Princes, de ſorte que comme ils eſtoient tous deux fort affligez, ils ne prirent pas garde à moy, & j’entendis qu’Abradate dit au Roy de Pont, qu’il le conjuroit de luy redonner ſes Troupes, afin d’aller apres les Raviſſeurs de Panthée. Comme le Roy de Pont n’avoit que mille Chevaux ; qu’Abradate n’en avoit plus que quinze ou vingt des mille qu’il avoit eus ; & que le Roy de Pont avoit sçeu en marchant qu’il eſtoit ſuivi, il fit comprendre à Abradate, que ce ſeroit expoſer Mandane, & s’expoſer luy meſme inutilement, que d’aller peut-eſtre attaquer toute voſtre Cavallerie avec ſi peu de gens. Au reſte, luy dit il, ne craignez rien pour la Reine voſtre Femme : car Cyrus eſt le plus genereux Prince du monde : & pour ce qui eſt de Ciaxare, tant que nous aurons la Princeſſe Mandane en nos mains, il ne mal-traitera pas Panthée. C’eſt pourquoy, luy dit il, laiſſez moy aller juſques au Pont, que je dois rompre apres l’avoir paſſé : & retournez vous en apres executer promptement & genereuſement ce que vous avez promis à Creſus : & attendez la liberté de Panthée, par la meſme voye qui la donnera à toute l’Aſie. Enfin, Seigneur, apres pluſieurs autres diſcours, où l’on voyoit bien qu’il y avoit beaucoup d’incertitude en leurs eſprits, & que je ne pouvois pourtant pas tous entendre :