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reprit Ameſtris, sçachez s’il vous plaiſt une choſe : qui eſt, que quand je vous haïrois effroyablement, & que j’aimerois Aglatidas plus que moy-meſme, je ne luy parlerois jamais : & que plus j’aurois de tendreſſe pour luy, plus j’apporterois de ſoin à éviter ſa rencontre : ainſi mettez-vous l’eſprit en repos de ce coſté là ; & s’il eſt poſſible laiſſez y moy. Il n’eſt pas aiſé, reprit-il, qu’un homme que vous allés rendre malheureux le reſte de ſes jours, puiſſe vous y laiſſer : Mais apres tout, interrompit Artemon, que voulez-vous ? je n’en sçay rien, repliqua-t’il bruſquement, c’eſt pourquoy en attendant que j’aye bien reſolu ce que je veux, j’entens touſjours que Menaſte, qui eſt parente d’Aglatidas, & qui en eſt ſans doute la confidente, s’en retourne à Ecbatane : & qu’Ameſtris ne la voye jamais. Seigneur, interrompit-elle, faites-moy s’il vous plaiſt la grace de ne faire pas une outrage à une perſonne de la condition & de la vertu de Menaſte : augmentez vos reproches contre moy s’il eſt poſſible, mais ne perdez pas la civilité pour elle. Que ſi toutefois vous voulez que je ne la voye plus, je feray en ſorte qu’elle s’en retournera dans quelques jours à Ecbatane ſous quelqu’autre pretexte. Je vous entens bien, luy dit-il, vous voulez auparavant qu’elle parte, avoir loiſir de concerter avec elle par quelle voye vous recevrez des nouvelles d’Aglatidas. Mais Seigneur, reprit-elle, ſi Aglatidas eſtoit en termes avecques moy de pouvoir me donner de ſes nouvelles, & de recevoir des miennes, pourquoy ſeroit-il ſi éloigné d’icy ? Que voulez-vous que je vous die ? repliqua-t’il tout en colere, ſinon que vous me ferez perdre la raiſon & la vie. Artemon voyant que tout ce qu’Ameſtris luy diſoit, l’aigriſſoit plutoſt