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la bouche, Otane luy dit que l’affaire pour laquelle il alloit eſtoit preſſée ; qu’il ne pouvoit pas aller en Chariot ; & qu’ainſi ce ſeroit pour une autre fois : de ſorte qu’il falut le laiſſer partir, & qu’Ameſtris demeuraſt en une inquietude eſtrange. Et certes ce n’eſtoit pas ſans ſujet, car à peine Otane fut il arrivé chez luy, qu’il ſe mit dans la fantaiſie de viſiter tout l’Apartement d’Ameſtris fort exactement. Le Concierge le luy ouvrit : donc tout entier, à la reſerve du Cabinet, dont il luy dit qu’il n’avoit pas la Clef : & quoy que cela ne fuſt pas fort extraordinaire, neantmoins ſans tarder davantage, feignant d’avoir beſoing de quelque choſe qu’il diſoit avoir donne à garder à Ameſtris, il en fit enfoncer la porte, & il y entra, y demeurant ſeul avec un Eſcuyer qu’il avoit, qui ſe nommoit Dinocrate, & qui avoit part à tous ſes ſecrets. Il chercha d’abord dans les Tiroirs de deux grands Cabinets qui y eſtoient, & dont il fit rompre les Serrures : il ouvrit pluſieurs Boittes qu’il y trouva : il regarda ſur toutes les Tablettes : dans des vaſes qui eſtoient deſſus : il leva meſme les Tableaux & la tapiſſerie : & il eſtoit tout preſt de reſſortir, bien ſatisfait de n’avoir rien trouvé de ce qu’il cherchoit ; lors que Dinocrate voyant un voile de Gaze ſur la Table, où il paroiſſoit y avoir quelque choſe deſſous, le tira, & deſcouvrit ce petit Coffre d’Orſevrerie, où eſtoient les Lettres d’Aglatidas. Dinocrate fit alors un grand cry, comme s’il euſt trouvé un grand threſor : & Otane ſe raprochant en diligence, avec un battement de cœur eſtrange ; le prit, & ſans conſiderer que l’ouvrage en eſtoit admirable, il le rompit avec une violence extréme. Mais ô Dieux ! dés qu’il l’eut ouvert, & que tirant les Lettres