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vous eſt pas indifferent : mais voſtre rongeur ne m’a pas bien expliqué ſi vous en avez de la douleur ou de la joye. C’eſt aſſurément (dit Menaſte en riant, afin de rompre cét entretien) qu’Ameſtris s’eſt imaginée que vous voudriez qu’elle retournaſt avecques vous à la Ville : & qu’elle a eu peur de quitter ſi-toſt un lieu où elle ſe plaiſt infiniment. Otane ne dit plus rien apres cela, que quelques paroles que l’on n’entendit pas, & ſe retira fort chagrin : car encore qu’il laiſſast ſa Femme en une maiſon tres ſolitaire : neantmoins il ne laiſſoit pas d’eſtre inquiet ; & d’eſtre fort empeſché à expliquer la rougeur d’Ameſtris & pour quel ſujet elle avoit regardé Menaſte, qui depuis ce jour là luy devint ſuspecte ſans sçavoir pourquoy. Cependant Ameſtris n’eſtoit pas en une petite peine : de voir qu’Otane s’en alloit en un lieu où il y avoit une choſe qu’elle craignoit tant qu’il ne viſt. Elle ne sçavoit donc quelle reſolution prendre : car comme tous les domeſtiques eſtoient tes eſpions, & qu’il enduroit cent impertinences d’eux, parce qu’il les employoit à obſerver ce qu’elle faiſoit : elle n’oſoit pas entreprendre d’en gagner un, pour luy donner la Clef de ſon Cabinet : & pour l’obliger à luy aporter ce petit Coffre, qui luy donnoit tant d’inquietude. Elle apprehendoit auſſi eſtrangement qu’Otane ne s’allaſt adviſer de faire ouvrir ce Cabinet : touteſfois ne trouvant pas grande aparence qu’il le deuſt faire, puis qu’il n’y en avoit point qu’elle deuſt y avoir rien laiſſé de pareille nature : elle ſe reſolut de laiſſer aller la choſe au hazard. Menaſte luy propoſa pourtant de dire à ſon Mary, qu’elle ſeroit bien aiſe d’aller pour deux ou trois jours à Ecbatane, & qu’elle le prioit de l’y remener : mais dés qu’elle en penſa ouvrir