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ne voy pas que vous en avez ſujet, luy repliqua-t’il, car enfin qu’imaginez vous en cela, ou vous puiſſiez avoir intereſt ? Aglatidas, quand vous avez épouſé Ameſtris, aimoit Anatiſe, à ce que tout le monde croyoit : depuis ce temps là il rompt avec elle & s’en va ; que vous importe, & que vous peuvent importer toutes ces choſes ? je ne vous puis pas bien démeſler tout ce que je penſe ; répondit-il, mais je voudrois pourtant bien qu’Aglatidas fuſt encore amoureux d’Anatiſe. Elle le voir droit bien auſſi, reprit Artemon en riant, car il eſtoit bien aiſe d’avoir un prétexte de le pouvoir faire, ſans qu’Otane s’en puſt offencer : & en effet l’embarras où il luy voyoit l’eſprit, luy en donnoit une ſi ſorte envie, qu’il ne pouvoit s’en empeſcher. De ſorte que voulant du moins railler avecques luy en façon qu’il ne s’en fâchaſt pas ; Enfin, luy dit-il, Otane determinez vous un peu : eſtes vous jaloux ou bizarre ? je ne sçay pas bien ce que je ſuis, reprit-il, mais je sçay touſjours que je ſuis fort inquiet : & que je ſens à peu prés tout ce que la jalouſie peut faire ſentir. C’eſt pourtant la premiere fois, répondit Artemon, qu’une Femme a donné de la jalouſie à ſon Mary en ſe negligeant ; en ne ſortant point ; en ne voyant perſonne, & en cachant ſa beauté avec autant de ſoing que les autres monſtrent la leur. C’eſt par ou je ſuis le plus à pleindre, repartit Otane, car je ne voy point de remede à mes maux. Si Ameſtris alloit au Bal, & que je ne le trouvaſſe pas bon, je n’aurois qu’à l’empeſcher d’y aller : mais de la façon qu’eſt la choſe, je ne sçay pas trop bien quel remede y chercher. Si vous m’en croyez, luy dit Artemon, vous n’y en chercherez point : eſtant