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la derniere, l’eſtat où eſtoit le Roy de Pont, l’éloignement de Spitridate, & l’amour du Prince Phraarte luy donnoient de fâcheuſes heures. Panthée avoit auſſi ſes chagrins & ſes douleurs : mais la civilité de Cyrus, ſon adreſſe, & ſon eſprit les ſuspendoient quelqueſfois : cherchant avec une bonté extréme à rendre leur captivité la moins rude qu’il luy eſtoit poſſible. Durant que les choſes eſtoient en cét eſtat, c’eſt à dire durant que toute l’Aſie eſtoit en armes, & ne faiſoit plus qu’attendre que le Soleil euſt ſeché le Champ de Bataille, S’il eſt permis de parler ainſi, & donné un nouveau vert aux Palmes qui devoient couronner les Vainqueurs : Cyrus eſtant dans une impatience qui n’avoit pourtant rien de chagrin, parce qu’il eſperoit delivrer bien-toſt Mandane, & aquerir une nouvelle gloire, vit arriver Artabane, que Ciaxare luy envoyoit : qui luy aprit que toute la Medie eſtoit paiſible, que ce Prince eſtoit en ſanté, & qu’il luy renvoyoit Aglatidas, avec des nouvelles Troupes. Au nom d’Aglatidas, Cyrus embraſſa encore Artabane, & le conjura inſtamment de luy dire s’il eſtoit heureux. Seigneur, luy dit-il, j’ay ordre de luy de vous aprendre la fuite de ſon hiſtoire, qui n’eſt pas moins ſurprenante, que ce que vous en sçavez deſja eſt extraordinaire. C’aura donc eſté Megabiſe, repliqua Cyrus, qui aura troublé ſon bonheur : c’eſt en vain Seigneur, reprit-il, que vous voulez deviner ſes avantures : car elles ſont ſi bizarres, que cela n’eſt pas poſſible. Cependant comme Artabane paroiſſoit extremement las, Cyrus ne voulut pas le retenir plus longtemps : & l’envoyant repoſer, il remit la choſe au lendemain. En effet, il ménagea ſi bien ſon temps, qu’apres avoir donné tous, les ordres neceſſaires, il trouva