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contraint d’eſtre ennemy d’un ſi grand Prince : je vous promets touteſfois, Madame, adjouſta-t’il encore, ſi le ſort des Armes m’eſt favorable, de ne me ſervir jamais contre luy du droit des Conquerans & des Vainqueurs, que pour le ſeul intereſt delà Princeſſe Mandane : je vous declare de plus aujourd’huy, qu’il ne portera jamais d’autres fers, que ceux que cette belle Perſonne luy a donnez : & que la meſme main qui luy a offert une Couronne, ne luy donnera point de chaiſnes. Le Roy d’Aſſirie plus impatient de ſon naturel, eut bien de la peine à ſe retenir : & quelque reſpect qu’il euſt pour Araminte, il ne pût s’empeſcher de laiſſer aller quelques paroles piquantes, qui tenoient beaucoup de la colere & des menaces. Apres cela Cyrus ſe retirant, ce Prince fit la meſme choſe : & le ſeul Phraarte demeura lors que tout le monde fut party, pour faire ſa viſite à part. Cependant depuis le retour de cette Princeſſe, Cyrus agit d’une autre ſorte : & quoy que l’hiver ne fuſt pas encore finy, il commença tout de bon de donner beaucoup de peine à ſes ennemis. Il ne ſe paſſoit point de jour qu’il n’envoyaſt des parties à la guerre : & peu qu’il n’y allaſt luy meſme. Il recevoit advis ſur advis de par tout, & il employoit tout ſon temps à s’informer de ce que faiſoit Mandane ; quelles eſtoient les forces de Creſus ; quels pouvoient eſtre ſes deſſeins : par ou il les pourroit traverſer ; & par quels moyens il pourroit delivrer ſa Princeſſe. Il donnoit ordre à toutes les Machines neceſſaires pour un grand Siege, ne sçachant pas s’il n’en faudroit point faire un : il dépeſcha vers Thraſibule, afin que par ſes intelligences il pûſt avoir des Vaiſſeaux de guerre, en cas qu’il faluſt aſſieger Epheſe. Mais