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Palmis, ne l’euſt cruellement tourmente.

Cyrus ne voyant donc plus d’eſpoir de delivrer Mandane que par la force, tint conſeil de guerre le jour ſuivant : où le Prince Artamas tint ſa place avec beaucoup d’honneur : parlant de toutes les choſes que l’on y propoſa, avec autant d’eſprit & de jugement, que ſi une plus longue experience euſt fortifié ſa raiſon : & il parut bien enfin, que ceux qui aprennent à vaincre de bonne heure, sçavent les choſes parfaitement, quand les autres les ignorent encore : & qu’il n’eſt pas impoſſible qu’un jeune Conquerant ſoit plus habile, qu’un vieux Capitaine qui n’aura pas tant veû que luy, quoy qu’il ait vécu davantage. La reſolution de ce conſeil fut, que comme la ſaison eſtoit fort avancée, & que Creſus n’avoit encore rien entrepris ; Il faloit luy envoyer demander la Princeſſe Mandane, auparavant que de luy declarer la guerre. Le Prince Artamas inſista le plus à faire prendre cette reſolution : ne pouvant oublier les obligations qu’il avoit à Creſus, malgré tous les mauvais traitemens qu’il en avoit reçeus depuis. De ſorte qu’il n’oublia rien pour perſuader à Cyrus de tenter toutes les voyes de la douceur, auparavant que d’avoir recours à la force. Cyrus eut pourtant bien de la peine à s’y reſoudre : alleguant pour raiſon, qu’il s’eſtoit ſi mal trouvé d’avoir envoyé en Armenie, qu’il avoit ſujet de s’en repentir. Mais on luy dit que la choſe n’eſtoit pas égale : puis que le Roy de Lydie ne pouvoit pas nier que la Princeſſe Mandane ne fuſt dans ſes Eſtats : & qu’ainſi il faudroit qu’il répondiſt preciſément. De plus, on luy repreſenta qu’il n’eſtoit pas poſſible d’aſſieger Epheſe en la ſaison ou l’on eſtoit, quand meſme il auroit eu une Armée navale qu’il n’avoit pas ; de ſorte qu’il ſembloit