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lier de Menecée : de ſorte que voulant voir ce qu’on luy avoit donné, il viſita toutes les choſes que ce Domeſtique de mon Pere luy avoit laiſſées : & y trouva toutes celles dont je vous ay deſja parlé. Si bien que ne pouvant cacher ſa richeſſe, dans la joye qu’il avoit de la poſſeder, il fit voir ce petit Tableau à la Femme de ſon Maiſtre : qui trouvant quelque legere reſſemblance de cét Amour que vous sçavez qui y eſt repreſenté avec Cleandre, le luy fit voir, comme un cas fortuit tort extraordinaire. Si bien, Madame, que par là nous recouvraſmes tout ce qui avoit eſté perdu ; en recompenſant celuy à qui on l’avoit donné. Je vous laiſſe à juger de la joye de Cleandre, de voir qu’il retrouvoit une Couronne, lors qu’il n’avoit plus d’eſperance de la poſſeder. Il fit donc sçavoir à la Princeſſe Palmis, cette prodigieuſe rencontre : mais quoy que Menecée peuſt faire, il luy fut impoſſible d’obtenir pour Cleandre la permiſſion de voir la Princeſſe : & tout ce que nous peuſmes fut que par l’adreſſe de Cyleniſe, il eut la liberté de luy écrire, & qu’elle eut la bonté de luy répondre. Cependant nous ne sçavions pas trop bien que faire ; parce que Cleandre ne pouvoit ſe refondre de s’en aller ſe faire reconnoiſtre au Roy ſon Pere, & laiſſer la Princeſſe Palmis à Epheſe. Il n’oſoit auſſi ſonger à l’enlever de là, quand meſme elle y auroit conſenty ; ne sçachant pas s’il trouveroit un Azile aſſuré pour elle, & s’il ſeroit reconnu pour ce qu’il eſtoit. Il n’oſoit non plus ſonger à faire sçavoir à Creſus qu’il avoit retrouvé tout ce qui pouvoit ſervir à la reconnoiſſance ; ayant sçeu par une Lettre de la Princeſſe, que la qualité de Fils du Roy de Phrigie ne luy ſeroit pas avantageuſe dans l’eſprit du Roy ſon