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agreable nouvelle, par une grande inquietude ? Vous verrez bien. Madame, repliqua t’il, que la choſe n’eſt pas comme vous la penſez : quand vous m’aurez donné loiſir de vous aprendre, que ce Prince à qui je dois le jour, eſt ce meſme Roy de Phrigie, que vous m’ordonnez d’aller vaincre, & qu’il ne m’eſt plus permis de combattre. Et alors il luy raconta avec le moins de paroles qu’il put, comment Thimettes avoit veû ce petit Tableau de Venus ſur la Table de ſa Chambre : comment Cyleniſe luy avoit dit de quelle facon il avoit eſté trouvé : & en ſuitte la rencontre que Thimettes avoit fait d’Acrate, & tout ce qu’il luy avoit apris : ſans oublier pas une circonſtance, de toutes celles qui pouvoient juſtifier ſa condition à la Princeſſe : qui l’écouta avec une attention extréme, & une joye qui n’eſtoit pas mediocre, quoy qu’elle fuſt meſlée. De beaucoup d’inquietude. Apres qu’il eut achevé de parler, quelque redoutable ennemy que vous ſoyez, luy dit-elle, je vous eſtime ſi fort, que je ne voudrois pas que vous fuſſiez encore l’inconnu Cleandre : & j’aime beaucoup mieux, que vous ſoyez le Prince Artamas. Ce n’eſt pas, adjouſta t’elle, que je ne prevoye bien les fâcheuſes ſuittes que peut avoir cette glorieuſe qualité que vous devez porter, mais enfin le Roy de Phrigie & le Roy mon Pere peuvent faire la paix : & vous ne pourriez pas devenir Fils de Roy, ſi vous ne l’eſtiez pas nay. Mais, pourſuivit-elle, qu’avez vous deſſein de faire ? car je ne juge pas qu’il ſoit bien aiſé, que les ſentimens du Prince Artamas puiſſent s’accorder avec ceux de l’inconnu Cleandre. Ceux de Cleandre ne ſont pourtant pas changez, luy dit-il, depuis qu’il sçait qu’il eſt le