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d’attirer mon aversion, par les tesmoignages que vous me donnez de vostre amour. Sçachez donc que je protegeray dans la Cour du Roy mon Pere, celuy qui m’a protegée dans la vostre : & que c’est par le pardon de Mazare que vous pouvez obtenir le vostre de la Princesse de Medie : & trouver quelque place en son estime, n’en pouvant jamais avoir en son affection.

MANDANE.

Artamene achevant de lire ce Billet, se repentit de tout ce qu’il avoit dit & pensé contre Mazare ; & admirant sa generosité, il faisoit autant de vœux pour son falut, qu’il en avoit fait pour sa perte. Que les apparences sont trompeuses, disoit il, & qu’il y a de temerité à juger des sentimens d’autruy, à moins que d’en estre pleinement informé ! Qui n’eust pas dit que Mazare estoit le plus criminel des hommes ; & que l’infidelité qu’il avoit euë pour le Roy d’Assirie, ne pouvoit avoir d’autre cause qu’une injuste amour ? Cependant il se trouve que la pitié & la compassion, sont les veritables motifs qui l’ont fait agir : & il n’a pas tenu à luy que je ne fois parfaitement heureux. Mais, adjoustoit il, si la tempeste a espargné sa Galere, comme je le veux esperer ; mon bon heur ne me fera pas long temps differé : & je n’auray bien tost plus d’autre desplaisir, que celuy de n’avoir rien contribué à la liberté de ma Princesse ; & d’estre arrivé trop tard pour la delivrer. Mais qu’importe, poursuivoit il, par quelles mains le bon heur nous arrive, pourveû que nous le recevions ? Joüissons donc de cette esperance : & disposons nous à estre l’Ami de Mazare ; & à le