crû : & elle jugea qu’il valoit encore mieux finir tost ce discours, que de le continuer davantage. C’est pourquoy reprenant la parole avec beaucoup de douceur ; du moins, dit-elle, promettez moy que vous vivrez, comme si vous vous aimiez : & que vous ne vous contredirez jamais en aucune chose. Philidaspe, respondit Artamene, paroist si zelé pour le service du Roy & pour le vostre ; & je le suis aussi de telle sorte, qu’il y a lieu de croire, que nous aurons tousjours beaucoup de raport en tous nos desseins : du moins sçay-je bien, repliqua Philidaspe, que nous nous rencontrons en tous lieux : & je pense que depuis le premier jour qu’Artamene arriva en Capadoce, je l’ay tousjours veû par tout. Il est vray que je vous rencontray au Temple de Mars, respondit Artamene, le lendemain que j’eus abordé à Sinope : quel jour fut celuy-là ? reprit la Princesse ; ce fut celuy, repliqua Philidaspe, où l’on sacrifioit pour remercier les Dieux de la mort de ce Prince qui devoit renverser toute l’Asie, & vous oster la Couronne. Je m’en souviens bien (dit la Princesse, qui vouloit destourner la conversation) & je n’eus de ma vie si peu de disposition à les remercier d’un bien-fait que ce jour-là. Ce n’est pas, que selon ce que les Mages en ont dit, la perte du jeune Cyrus, n’ait esté un bonheur par toute l’Asie : mais c’est que naturellement j’ay tant de repugnance à me resjoüir de la mort de quelqu’un ; que j’ay eu besoin de m’interesser beaucoup en la felicité publique, pour pouvoir obtenir de moy, de prendre quelque part en celle-cy. Et quoy, Madame, respondit mon Maistre en rougissant un peu, estes vous assez bonne, pour n’avoir pas haï Cyrus ? & comment (interrompit Philidaspe, qui vouloir tousjours estre
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