de pire : car enfin que veux-je, & que puis-je vouloir ? Mais helas ! adjoustoit il, c’est parce que je ne sçay ce que je veux, ny ce que je puis vouloir ; que je suis inquiet, & que je suis malheureux. Je sçay bien toutefois, que si je suy mon inclination, j’aimeray la belle Mandane, toute mon ennemie qu’elle est. Mais que dis-je j’aimeray ? Ha ! non, non, j’explique mal mes pensées : & ma langue a trahi les sentimens de mon cœur. Disons donc que je sçay bien que j’aime Mandane ; que je la veux tousjours aimer ; & que je ne seray jamais heureux, que je ne puisse esperer d’en estre aimé. Mais helas ! infortuné que je suis, poursuivoit il, ne viens-je pas d’apprendre, qu’elle fait des Sacrifices pour remercier les Dieux de ma mort ? & ne viens-je pas de sçavoir, que Cyrus ne luy peut jamais plaire que dans le Tombeau, où elle le croit ensevely ? Apres cela, il estoit quelque temps un peu plus en repos : s’imaginant que cette consideration seroit assez forte, pour le guerir de cette passion naissante. Mais tout d’un coup, l’esperance qui seule fait vivre l’amour ; & qui s’attache mesme aux choses les plus impossibles, pour entretenir dans une Ame ce feu consumant qui la devore, & qui ne peut subsister sans elle ; luy persuada qu’Artamene n’estoit plus Cyrus : & qu’il ne devoit presque plus prendre de part, à ce que l’on seroit contre luy, tant qu’il ne seroit fait que contre le fils du Roy de Perse : & qu’ainsi encore que Cyrus fust haï, Artamene ne laisseroit pas d’estre aimé, s’il en cherchoit les moyens, & qu’il taschast de s’en rendre digne par ses services. Mais au milieu de ce raisonement flateur, cét ardent desir d’aquerir de la gloire, qui jusques là avoit esté Maistre de son cœur, commença de disputer
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