Audience, à une des plus Grandes & des plus ſages Princeſſes de toute l’Europe. Ce Vainqueur de la moitié du Monde, qui croit avécque raiſon que Voſtre Alteſſe ſeroit digne de le commander tout entier : vient mettre à vos pieds ſes Palmes & ſes Trophées, & advoüer ingenûment, qu’il a moins conqueſté de Sceptres & de Couronnes, que vous ne meritez d’en avoir. Il a sçeu que vous n’avez pas autrefois dénié voſtre Glorieuſe protection à un Prince déguiſé : ſi bien qu’eſtant déguiſé & Prince ; & Prince incomparablement plus fameux que l’autre, il a creû qu’il pouvoit aſpirer au meſme honneur. Il a creû, dis-je, que puis que vous aviez en ſuitte eſcouté favorablement la Mort de Ceſar, vous ſouffririez bien la vie de Cyrus : & que vous luy permettriez de ſe faire revoir à tout l’Univers, avec plus d’éclat & plus de ſplendeur, qu’il n’en avoit en montant aut Throſne des Rois d’Aſſirie, veû la ſplendeur & l’éclat qui rejalira ſur luy de voſtre illuſtre Nom, ſi vous agreez qu’il le meſle parmy ſes Lauriers, & qu’il le porte par toute la Terre. Il sçait bien, Madame, qu’en pretendant à cette gloire, ſon ambition eſt extréme : Mais qui doit eſtre hardy, ſi ce ne ſont les Conquerans ? Et que n’entreprennent point ces heureux Temeraires, que la Fortune favoriſe ? Et puis il eſt certain que peu de Rois l’ont égalé : & que ſi Alexandre meſme à eu depuis ſa valeur & ſon eſprit, il n’a pas eu ſa ſagesse & ſa temperance. En un mot, il a eſté ſeul de qui l’on puiſſe dire comme de Voſtre Alteſſe, qu’il avoit toutes les vertus &
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