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propre pour les concerts d’Inſtrumens. De ſorte qu’ayant fait propoſer la choſe, par la Princeſſe Palmis qu’il en pria, cette partie ſe fit, & s’acheva peu de jours apres. Quand Doraliſe & moy sçeuſmes que le Prince Mexaris donnoit la Muſique chez luy aux Princeſſes, nous creuſmes qu’enfin ſon amour alloit eſclatter tout de bon : & que nous verrions qu’il n’eſtoit point de mauvaiſe habitude, que cette paſſion ne pûſt corriger. Nous attendiſmes donc cette journée, avec beaucoup plus d’impatience, que n’en avoient Abradate & Perinthe : car ce premier commença de s’apercevoir que ſon Oncle eſtoit ſon Rival : & pour l’autre, il s’en eſtoit aperçeu, dés le premier inſtant que la choſe avoit eſté, Cependant comme l’amour d’Abradate n’eſtoit plus en termes de pouvoir eſtre ſurmontée par la raiſon, il ſe prepara à ſouffrir tout ce qu’il luy en pouvoit arriver. Mexaris de ſon coſté, ne douta point que la veuë de tant de richeſſes n’agiſt autant contre Abradate que pour luy, quand il les feroit voir à Panthée : ſi bien qu’il preſſa autant qu’il pût, le jour & l’heure de l’Aſſemblée qui ſe devoit faire chez luy : donnant un tel ordre à toutes choſes, qu’il n’y avoit pas un ſeul Apartement en tout ſon Palais, où il n’y euſt des marques de la richeſſe & de la magnificence du dernier Roy de Lydie ſon Pere : qui aimant cherement Mexaris, luy avoit donné la moitié de ſes Threſors. En effet je ne penſe pas que l’on puiſſe jamais rien imaginer de plus ſuperbe, que ce que l’on fit voir à la Princeſſe dans ce Palais : car outre que toutes les Salles & toutes les Chambres eſtoient meublées tres magnifiquement, il y avoit encore une Galerie & trois Cabinets, tous pleins de choſes rares, riches, & precieuſes. Ce n’eſtoit touteſfois pas ſeulement