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trop, & de s’attendrir luy meſme. Il ſe contentâ donc de luy renouveller en peu de paroles, les aſſurances d’une affection inviolable, & d’une paſſion eternelle : apres quoy il luy promit de l’aquiter envers Cyrus de tout ce qu’elle luy devoit : de ſorte que s’engageant inſenſiblement à parler de ce Prince, ils en firent un grand Eloge, en ſe reuſſouvenant comment il les avoit traitez ; Panthée faiſant durer cette converſation avec adreſſe, afin de differer ce cruel, adieu, & de voir plus long temps ſon cher Abradate, qui n’avoit jamais eſté plus beau ny de ſi bonne mine, qu’il eſtoit avec ces magnifiques Armes. Mais enfin ce Prince voyant qu’il eſtoit temps de partir, embraſſa ſa chere Panthée : & la quittant ſans pouvoir prononcer le mot d’adieu, il traverſa une Antichambre, & alla pour monter dans un ſuperbe & magnifique Chariot de guerre, qui l’attendoit devant le Perron de ce Chaſteau. Panthée le ſuivant, accompagnée de toutes les Dames priſonnieres. Mais comme il vint à ſe retourner, & qu’il la vit avec une douleur ſur le viſage qui n’avoit pourtant rien que de Grand & d Heroïque : il retourna encore une fois vers elle : & la prenant par la main, qu’il luy baiſa, en voulant l’obliger de rentrer ; veüillent les Dieux, s’eſcria t’il, que je puiſſe faire voir que je ne ſuis pas indigne d’eſtre Mary de Panthée, & Amy de l’illuſtre Cyrus : apres quoy la quittant, il ſe jetta avec precipitation dans le Chariot qui l’attendoit, la conjurant encore une fois, apres qu’il y fut, de ſe retirer. Elle ne le fit pourtant pas : au contraire, elle le ſuivit des yeux autant qu’elle pût : & il la regarda auſſi le plus longtemps qu’il luy fut poſſible. Mais comme ſi la conſtance de Panthée luy euſt eſté inſpirée par