Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/578

Cette page n’a pas encore été corrigée

parler bas enſemble, y priſſent garde ; & ce fut celle qui luy avoit ouvert la porte, qui courut à luy, faiſant ſemblant qu’elle eſtoit bien fâchée qu’il fuſt entré : & en demandant meſme pardon à ſa Maiſtreſſe, qui en effet en ſur en colere. Auſſi voulut elle d’abord l’obliger à ſortir de ſa Chambre, mais comme il s’obſtina à ne le vouloir pas faire, & que Leoniſe eut peur que les Femmes qui eſtoient aupres d’elle, ne tiraſſent quelque conſequence de cette conteſtation ; & que de plus elle avoit une extréme envie de faire des reproches à Beleſis : elle ſouffrit enfin qu’il demeurait, & qu’il luy fiſt une viſite. Une fut pas pluſtoſt aſſis qu’il luy demanda pourquoy elle avoit voulu le chaſſer ſi cruellement, en un temps où il avoit tant de beſoin d’eſtre conſolé. Mais Leoniſe prenant la parole avec precipitation ; c’eſt, luy dit elle, qu’ayant reſolu de vous chaſſer de mon cœur, j’ay voulu dés aujourd’huy commencer à vous chaſſer de ma Chambre. Madame, luy dit il, je voy bien que Cleodore vous a preoccupée à mon prejudice : ha Beleſis, repliqua t’elle, vous voyez bien que celle que vous nommez ſe repentant du conſentement qu’elle avoit aporté à voſtre fourbe, me l’a enfin découverte. Beleſis forte eſtonné d’entendre parler Leoniſe, ne sçavoit que penſer de ce qu’elle luy diſoit : car il ne sçavoit que trop que c’eſtoit Cleodore qu’il avoit trompée, & qu’il n’avoit jamais trompé Leoniſe. Il la pria donc de vouloir luy dire dequoy elle l’accuſoit : de ſorte que Leoniſe toute douce qu’elle eſtoit, ſi irritée de cette demande, qu’elle luy dit cent choſes fâcheuſes : luy faiſant pourtant entendre le crime qu’elle croyoit qu’il euſt commis. Beleſis voulut alors ſe juſtifier, mais elle ne pût ſouffrir qu’il parlaſt : Non non, luy