Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/543

Cette page n’a pas encore été corrigée

changer de deſſein à Cleodore.

Pour cét effet, il fut le chercher à l’heure meſme : & par bonheur pour luy, il le trouva qu’il venoit de r’entrer dans ſa Chambre. Il ne le vit pas pluſtoſt, que Beleſis vint au devant de luy, pour luy rendre grace de ce qu’il avoit ſi fort occupé Cleodore ce jour là, qu’elle n’avoit point eſté aupres de Leoniſe, qu’il avoit entretenuë avec un plaiſir extréme. Je ſuis ravy, luy dit Hermogene, de pouvoir contribuer quelque choſe à voſtre felicité : mais mon cher Beleſis, luy dit il en l’embraſſant, il faut que vous faciez auſſi quelque choſe pour taſcher de m’empeſcher d’eſtre malheureux. Il n’eſt ce ne ſemble pas beſoin : reprit Beleſis, de me faire une conjuration ſi forte : car pouvez vous douter que je ne face pas tout ce que je pourray pour voſtre ſervice ? Tout à bon Hermogene, pourſuivit il, voſtre procedé m’offence eſtrangement : puis que ſelon moy, il n’eſt point permis de faire de prieres à ſes veritables Amis : ſuffiſant ſans doute de leur faire sçavoir le beſoin que nous avons d’eux, pour les obliger à nous ſervir. Parlez donc le vous en conjure & me dittes promptement ce qu’il faut que je face pont vous. Il faut, repliqua Hermogene, puis que vous ne voulez pas qu’on vous prie, que vous me permettiez de faire sçavoir à Cleodore que vous ne l’aimez plus, & que vous aimez effectivement Leoniſe. Ha Hermogene, reprit Beleſis, il n’y a pas encore aſſez long temps que je ſuis inconſtant, pour pouvoir me reſoudre à paroiſtre tel aux yeux de Cleodore ! Et puis à quoy bon de luy deſcouvrir mon crime ? ſi c’eſt, adjouſta t’il, que vous ſoyez las de l’entretenir ſi ſouvent ; & que vous ſoyez ennuyé d’eſtre touſjours en un lieu où vous n’avez point d’attachement ; j’aime encore mieux que vous ceſſiez