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moy. Au nom des Dieux Madame, interrompit Hermogene, ne me demandez rien que je ſois contraint de vous refuſer : ſi je penſois eſtre refuſée, dit elle, je ne vous demanderois pas ce que je m’en vais vous demander : mais me confiant en voſtre ſageſſe, j’eſpere que vous me ferez la faveur de m’accorder ce que je veux de vous. Mais Madame, reprit Hermogene, que pouvez vous vouloir de moy davantage, que ce que je vous ay donne ? Je veux, luy dit elle, que pour certaines conſiderations qui me regardent, vous ne vous attachiez plus tant à me voir ny à me parler. Ha Madame, repliqua t’il, vous me demandez ce qui n’eſt pas en mon pouvoir de vous accorder ! mais Madame, adjouſta t’il, eſt-ce là une marque d’eſtime & d’affection ? C’en eſt une ſans doute, reprit elle, car ſi je n’avois pas voulu garder quelque meſure aveque vous, je vous aurois banny ſans vous en parler : c’eſt pourquoy il me ſemble que vous devez me sçavoir quelque gré de ma façon d’agir. Si vous me vouliez bannir, reprit il, parce que la Perſonne qui a pouvoir ſur vous ne trouveroit pas bon que j’euſſe l’honneur de vous voir ; ou parce que ma paſſion feroit trop de bruit dans le monde, j’advoüe que je pourrois en me flattant donner quelque ſens à ce que vous faites, qui me ſeroit avantageux : mais aimable Cleodore, je comprens bien que vous ne m’eſloignez de vous, que pour en raprocher Beleſis. Je vous demande pardon (’adjouſta t’il, voyant que Cleodore rougiſſoit de ce qu’il venoit de dire) de la liberté que je prens de vous parler avec tant de ſincerité : mais le pitoyable eſtat où je me trouve, doit ce me ſemble me ſervir d’excuſe aupres de vous. Cependant, pourſuivit Hermogene, j’ay à vous dire que quand ce ne ſeroit