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dans trois jours ſi la Princeſſe le veut. Si elle le veut ! reprit elle, ha Orſane je vous aſſure qu’elle le voudra : puis qu’encore que le Roy de Pont ſoit auſſi reſpectueux pour elle qu’il eſt injuſte, je ſuis aſſurée qu’il n’eſt rien qu’elle ne fiſt pour ſortir de ſa puiſſance. Cependant, dit elle, afin de sçavoir plus promptement quand la Princeſſe de Lydie ſe retirera, & que nous puiſſions plus toſt voir noſtre Liberateur, ſuivez moy s’il vous plaiſt : en diſant cela elle me mena par un petit Cabinet qui reſpondoit dans la Chambre de la Princeſſe, où l’on avoit fait un retranchement pour pouvoir avoir une Garderobe : car comme vous sçavez, les Places de guerre ne ſont pas baſties comme les Palais. Eſtant donc en ce lieu là, d’où nous pouvions entendre tout ce que ces Princeſſes diſoient, nous nous miſmes à eſcouter, afin de juger ſi la converſation finiroit bien toſt : de ſorte qu’apres nous eſtre teûs, j’entendis qu’une perſonne de qui la voix m’eſtoit inconnuë, & que Marteſie me dit eſtre la Princeſſe Palmis, ſe pleignoit de l’opiniaſtreté de ſa mauvaiſe fortune. Pour moy, luy repliqua la Princeſſe Mandane ; je n’oſe preſques plus me pleindre de la mienne : car puis que la conformité de nos malheurs m’a fait acquerir voſtre affection, & a en quelque façon cauſé l’amitié du Prince Artamas, & de l’illuſtre Cyrus, il me ſemble que je les dois ſouffrir plus patiemment. Ha Madame, interrompit la Princeſſe Palmis, ne donnez pas une cauſe ſi fâcheuſe à l’affection que j’ay pour vous : & ne cherchez pas en la conformité de nos diſgraces, ce que vous ne pouvez trouver qu’en voſtre rare merite. Joint qu’à regarder les choſes de fort prés, il y a touſjours eu une notable difference, entre les malheurs de Cyrus & ceux d’Artamas : & entre les voſtres &