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affliction la plus grande du monde. Beleſis le pria cent & cent fois, de le laiſſer mourir en ce lieu là, & de pourſuivre ſon voyage, mais il ne le voulut pas : au contraire, il luy proteſta, qu’il ne l’abandonneroit jamais. Cependant il ſe trouva que la maladie de Beleſis ne fut pas ſeulement dangereuſe, mais qu’elle fut encore tres longue : ce qui conſola pourtant un peu le Prince Mazare, fut qu’il apprit que la Princeſſe Mandane eſtoit dans le Temple de Diane à Epheſe ; qu’en la ſaison où l’on eſtoit, vous ne pouviez faire la guerre : & que quand il euſt eſté à Epheſe, il n’euſt pû ny voir Mandane, ny ſonger à l’oſter d’un lieu ſi ſacré que celuy là. Il ne laiſſoit pourtant pas de ſouffrir avec beaucoup d’impatience, la longueur du mal de Beleſis : qui enfin commença de ſe mieux porter, & de faire croire qu’il eſchaperoit : & en effet il eſchapa. Comme il fut donc abſolument hors de danger, & qu’il commença de quitter le lict, ſon Medecin luy dit que pour recouvrer plus promptement ſes forces, il faloit qu’il allaſt prendre l’air peu à peu, & qu’il ſe promenaſt : Beleſis qui mouroit d’envie d’eſtre bientoſt en eſtat de n’arreſter plus le Prince Mazare, creût le conſeil qu’on luy donnoit : de ſorte qu’apres s’eſtre promené quelques jours à pied, il ſe trouva avoir aſſez de force pour monter à cheval : ſi bien que pour eſſayer s’il en pourroit avoir aſſez pour ſe mettre en chemin, mon Maiſtre & luy firent deſſein de s’aller promener juſques à quarante ou cinquante ſtades de là, où il y avoit un Bois extrémement grand, & effectivement ils y furent, & je les y ſuivis. Mais Seigneur, à peine euſmes nous fait cent pas dans ce Bois, que mon Maiſtre qui marchoit ſeul, vingt pas devant Beleſis & moy qui parlions enſemble, vint à nous avec