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s’il pouvoit : & qu’avec intention d’y rentrer, S’il ne pouvoit executer ſon deſſein. Voyant alors avec quelle fermeté il me diſoit cela, je creûs qu’il valoir mieux ceder que de luy reſister davantage ; de ſorte que je conſentis à ce qu’il voulut. Nous nous informaſmes donc en quel eſtat eſtoient les choſes : & nous sçeuſmes que voſtre Armée avoit quitté l’Armenie, & avoit tourné teſte vers la Capadoce : pour aller de là ſur les frontieres de Phrigie, qui touchent la Lydie ; & que l’on diſoit qu’Abradate partiroit bientoſt de Suſe, pour s’aller jetter dans le Party de Creſus. Nous ſongeasmes alors ſi nous irions à Epheſe, ou par mer, ou par terre : mais le Prince Mazare ne voulut point ſe mettre au hazard de n’arriver pas où il vouloit aller, en ſe confiant à l’inconſtance des vents : joint que venant à ſonger qu’il y avoit plus loin par eau qu’autrement, & que le Roy de Pont n’avoit mené Mandane par cette voye, que parce qu’il aprehendoit d’eſtre ſuivy par l’illuſtre Cyrus, il fut reſolu que nous n’irioins point par mer : adjouſtant encore à toutes ces raiſons, que dans un Vaiſſeau nous ne sçaurions point de nouvelles de la Princeſſe Mandane, que nous ne fuſſions arrivez à Epheſe : où au contraire par terre nous en entendrions parler par tout : n’y ayant point de lieu en toute l’Aſie, où l’on n’en parlaſt alors. je ne vous diray point, Seigneur, quelle fut noſtre route, car ce ſeroit perdre le temps inutilement : mais je vous diray que nous fuſmes contraints pour marcher ſeurement, de prendre un aſſez long détour, & de nous arreſter à un endroit de Paphlagonie, qui touche la Capadoce. Car ſoit par le changement d’air, ou par le changement de nourriture, Beleſis tomba malade : & ſi malade, que le Prince Mazare creût qu’il mourroit, & en eut une