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vous dis que cette Princeſſe eſt vivante, ne vous conſoleray-je point ? nullement Orſane, repliqua t’il, parce que je ne le croiray pas : & que je penſeray que vous ne me le dittes que pour taſcher de me retirer de la Solitude où je vy, & où je ſuis reſolu de mourir. Il eſt pourtant certain, repliquay-je, qu’il n’eſt pas plus vray que je parle, qu’il eſt veritable que la Princeſſe que vous croyez morte eſt vivante, & que je l’ay veuë de mes propres yeux. Ha Orſane, s’eſcria t’il, que ne vous puis je croire, & mourir un inſtant apres ! afin de n’eſtre pas deſabusé d’un ſi agreable menſonge : & d’eſtre delivré pour touſjours, de toutes les peines que je ſouffre. Mais Seigneur, repris-je, eſt il poſſible que ce Deſert ſoit ſi peu frequenté, & l’Antre que vous habitez ſi inconnu à tous les hommes, qu’il n’en ſoit pas ſeulement venu un icy, pour vous aprendre que toute l’Aſie eſt en armes pour la Princeſſe Mandane, que l’illuſtre Anamene n’eſt plus Artamene, & eſt maintenant reconnu pour eſtre Cyrus, fils de Cambiſe Roy de Perſe ; que Ciaxare apres l’avoir tenu en priſon l’a delivré, & l’a remis à la teſte de ſon Armée ; que le Roy de Pont apres avoir perdu ſes Royaumes, s’enfuyant dans un Vaiſſeau ſauva la vie à la Princeſſe Mandane, un inſtant apres que la fureur des vagues vous eut ſeparé d’elle ; que l’invincible Cyrus croyant que ce Prince l’avoit menée en Armenie, y a porté la guerre, & s’en eſt rendu Maiſtre, qu’au lieu de delivrer la Princeſſe Mandane, il n’a delivré que la Sœur de ſon Rival, c’eſt à dire la Princeſſe de Pont ; qu’en ſuitte ayant apris que le Roy ſon Frere eſtoit à Suſe, avec la Princeſſe Mandane, & qu’elle en devoit partir, pour venir s’embarquer en Cilicie, conduite par le Roy de la Suſiane, & par la Reine Panthée, juſques