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mais Tiburte m’arreſtant tout court, m’aprit tout ce que je viens de vous dire. Apres cela, pourſuivit il, vous devez bien connoiſtre que les Dieux en vous amenant au lieu où vous eſtes, ont eu deſſein que je vous apriſſe que le Prince Mazare n’eſt point mort : afin que faiſant ce que j’avois reſolu de faire, vous l’alliez chercher toute voſtre vie, juſques à ce que vous l’ayez trouvé. Voila Orſane quel eſtoit mon deſſein : & voila quel doit eſtre le voſtre, s’il eſt vray que vous ayez touſjours pour ce Prince l’affection que vous avez euë autrefois. Si vous ne fuſſiez pas arrivé, j’euſſe engagé par ſerment le Sacrificateur que j’avois envoyé querir, à me promettre de faire advertir le Roy des Saces que le Prince ſon Fils n’eſt pas mort : mais puis que vous eſtes icy, je ne juge pas à propos de faire sçavoir qu’il eſt vivant, à un Sujet du Roy des Medes. Car enfin en enlevant la Princeſſe Mandane, il s’eſt fait de ſi redoutables Ennemis en la perſonne de Ciaxare, du Roy d’Aſſirie, & de l’invincible Artamene, qu’il eſt bon preſentement que la choſe ne ſoit sçeuë que de vous. Tiburte ayant ceſſé de parler, & luy ayant promis ſi les Dieux diſposoient de luy, de chercher noſtre illuſtre Maiſtre par toute l’Aſie, il parut eſtre un peu mieux : de ſorte que nous fuſmes prés de deux heures à parler du Prince Mazare. Comme il avoit sçeu depuis qu’il eſtoit en ce lieu là ; que la Princeſſe Mandane n’eſtoit point morte ; & qu’elle eſtoit en la puiſſance du Roy de Pont, que l’on croyoit l’avoir menée en Armenie : il me conſeilla apres avoir encore erré quelque temps en Capadoce, de m’y en aller auſſi : eſtant à croire que ce Prince, où qu’il fuſt, entendroit parler d’une choſe qui eſtoit sçeuë de toute la Terre : & qu’il ſe reſoudroit peut-eſtre à prendre party,