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pas manquer de luy eſtre tres utile durant la ſuitte de cette guerre. Il ne pût touteſfois ſe reſoudre à faire cét eſchange, ſans taſcher d’en tirer quelque ſatisfaction pour ſon amour : de ſorte qu’il dit à Andramite en preſence du Roy de Phrigie, qu’encore qu’il luy euſt eſté tres avantageux pour beaucoup de raiſons, d’avoir la Reine de la Suſiane en ſa puiſſance, juſques à la fin de la Guerre ; que neantmoins il honnoroit ſi fort le Roy de Phrigie ; il aimoit tant le Prince Artamas ; il eſtmoit de telle ſorte Abradate ; & reſpectoit Panthée d’une maniere ſi peu commune, qu’il conſentoit à ce que Creſus ſouhaitoit de luy : avec une condition ſeulement, qui eſtoit que durant la Tréve on luy permiſt de voir Mandane. Andramite l’entendant parler ainſi, le ſuplia de ne vouloir pas inſister ſur cela : parce que le Roy de Pont avoit ſi fortement refuſé Abradate, lors qu’il luy avoit demandé cette permiſſion, qu’il ne croyoit pas poſſible de l’y faire conſentir. Comme Creſus eſt Maiſtre dans ces Eſtats, reprit Cyrus, il doit s’y faire obeïr : c’eſt pourquoy il ne juge pas que le conſentement du Roy de Pont ſoit abſolument neceſſaire à ce que je le veux. Il ne l’eſt pas ſans doute, repliqua Andramite ; mais je ſuis pourtant perſuade par plus d’une raiſon, qu’il ne voudra pas agir d’authorité abſoluë en cette rencontre : & qu’il rompra pluſtost le Traité. je conſens qu’il le rompe, interrompit genereuſement le Roy de Phrigie, pluſtost que de ſouffrir que l’on refuſe cette ſatisfaction à un Prince à qui je ſuis ſi redevable : non non, reprit Cyrus, il ne faut pas croire que le Roy de Lydie ſoit ſi mauvais meſnager de ſes interreſts, qu’il ne conçoive bien qu’il luy eſt plus dangereux de deſobliger Abradate que le Roy de Pont : puis que l’un