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Camp ? non pas alors, reprit Aglatidas, car comme il eſt fort proche de la Ville, ils y eſtoient venus pour tenir conſeil de guerre : & en effet le Roy de Pont eſt pany de là pour venir commander l’Avantgarde. De vous dire Seigneur, adjouſta t’il, comment Abradate m’a reçeu, il ne me ſeroit pas poſſible : mais ce que je vous puis aſſurer, eſt que ce Prince aime certainement la Reine Panthée avec une paſſion eſtrange. En effet, il n’eut pas pluſtost leu ſa Lettre, qu’il m’aſſura qu’il ſeroit le protecteur de tous les Priſonniers que l’on feroit durant cette guerre, auſſi bien que de ceux qui eſtoient deſja à Sardis : me diſant cent choſes genereuſes & obligeantes. En ſuitte dequoy, voulant executer à l’heure meſme les ordres de Panthée, il fut trouver Creſus, comme je vous le diray, apres que je vous auray fait sçavoir comment le Roy de Pont me traita. je m’aſſure, reprit Cyrus, que j’auray le deſplaisir d’aprendre qu’il n’a pas ceſſé d’eſtre genereux : il eſt certain, repliqua Aglatidas, que j’ay eſté ſurpris de voir de quelle façon ce Prince a agy. Car Seigneur, vous n’avez rien fait pour luy, dont il ne ſe toit ſouvenu : il vous apella ſon Protecteur, & ſon Liberateur : il proteſta qu’il eſtoit au deſespoir d’eſtre ingrat : & me jura que c’eſtoit bien moins à la conſideration de la Princeſſe ſa Sœur, qu’à la voſtre, qu’il vouloir proteger le Prince Artamas, & tous les autres priſonniers. En ſuitte dequoy, m’ayant ramené chez Creſus, je fus teſmoin de tout ce que le Roy de la Suſiane & luy dirent en faveur d’Artamas & des autres : Creſus demeurant touſjours ferme, à dire que le Prince de Phrigie ne devoit point eſtre traité en priſonnier de guerre, mais en criminel d’Eſtat : & les deux autres ſoutenant au contraire avec ardeur,