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en attendant qu’il marchaſt : ſe fiant d’ailleurs tellement à l’Oracle qu’il avoit reçeu à Delphes, que quand ſon Armée euſt eſté auſſi foible qu’elle eſtoit forte, il n’euſt pas laiſſé d’eſperer la victoire, & de croire qu’il devoit deſtruire l’Empire qui ſembloit devoir eſtre un jour à Cyrus. Cependant comme ce Prince vouloit s’aſſurer de tous les paſſages ; ſe rendre Maiſtre de la Campagne ; & ne laiſſer point de Villes derriere luy, qui puſſent l’incommoder, il prit toutes celles qui ſe rencontrerent ſur ſa route : Il eſt vray que cela ne l’arreſta pas longtemps : car l’eſpouvante eſtoit ſi grande par tout, que la plus part ſe rendirent, dés que les Troupes aprocherent. Ce qui les y obligea encore davantage, ſut que Cyrus traitta avec beaucoup de douceur toutes celles qui ne luy reſisterent point, ne ſouffrant pas que ſes Soldats y fiſſent le moindre deſordre : mais en eſchange, celles qui ſurent aſſez hardies pour s’oppoſer au deſſein qu’il avoit d’aller diligemment à Sardis, pour y delivrer ſa chere Mandane, ſentirent ſans doute la peſanteur de ſon bras : & s’aperçeurent trop tard qu’il y a beaucoup d’imprudence d’entreprendre plus qu’on ne peut, & par conſequent plus qu’on ne doit. Apres s’eſtre donc aſſuré de tout ce qui luy pouvoit nuire, il ſe poſta avantageuſement, à une journée & demie de Sardis : tant pour donner quelque repos à ſes Troupes, Si rafraichir ſon Armée, que pour aprendre des nouvelles dés Ennemis, & attendre le retour d’Aglatidas. Il ne ſe paſſoit pourtant point de jour, qu’il n’y euſt quelque combat : car comme les vint mille hommes que commandoit Andramite pour Creſus s’eſtoient poſtez au bord d’un petit Ruiſſeau, qui n’eſtoit qu’à trois cens ſtades de là, où l’un ne pouvoit aller que par un défilé aſſez long,