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cela, Panthée fit qu’il luy fut poſſible pour s’excuſer de voit Perinthe, ſans en dire la veritable raiſon : ſa modeſtie ne luy permettant pas de nous dire ce qu’elle penſoit. Mais à la fin Doraliſe ſe ſervant de la liberté qu’elle avoit accouſtumé d’avoir avec la Princeſſe, luy dit la choſe telle que nous la sçavions : & la dit avec tant d’art, & ſi obligeamment pour Perinthe, que la Princeſſe n’eut aſſurément guere moins de douleur que de colere, d’aprendre la paſſion qu’il avoit pour elle. Panthée voulut pourtant d’abord nous cacher la moitié de ſes ſentimens : mais à la fin elle nous advoüa que la mort de Perinthe l’affligeoit : & luy ſembloit eſtre de ſi mauvais augure pour le reſte de ſa vie, qu’elle n’oſoit plus eſperer de le paſſer heureuſement. Elle nous fit alors cent reproches ? de n’avoir pas guery Perinthe de ſon amour : luy ſemblant qu’il n’y avoit qu’à dire des raiſons, pour guerir d’une pareille maladie. En ſuitte comme nous vouluſmes la ſuplier de vouloir faire une viſite à ce malheureux, elle rejetta fort loin la propoſition que nous luy en fiſmes : mais Madame, luy dis-je, il ne sçaura pas que nous vous ayons deſcouvert ſon ſecret : & vous ne ferez que ce que vous euſſiez ſans doute fait, ſi vous n’euſſiez rien ſoubçonné de ſon amour. Il ſuffit que je le sçache, dit elle, pour m’empeſcher de voir Perinthe : ce n’eſt pas que je ne ſois au deſespoir de la mort d’un homme à qui j’ay une obligation ſi conſiderable, comme eſt celle de m’avoir empeſchée de tomber en la puiſſance de Mexaris : touteſfois je ne puis me reſoudre à ce que vous deſirez de moy. Joint auſſi que s’il m’aime, ma veuë avanceroit pluſtost ſa mort, qu’elle ne la reculeroit : eſtant certain qu’il ne me pourroit voir ſans douleur. Puis quil le deſire, luy dis-je, il me ſemble qu’il y