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Abradate envoya sçavoir des nouvelles de la ſienne : de ſorte qu’apres avoir fait un compliment pour reſpondre à celuy de ce Prince, elle luy manda qu’elle ſe porteroit bien ſi ce n’eſtoit l’affliction qu’elle avoit, de venir d aprendre que Perinthe eſtoit malade, & ne vouloit point guerir. Et ſuitte dequoy, elle acheva de s’habiller, & fut au Temple comme à l’ordinaire : où Abradate ſe trouva pour luy donner la main, lors qu’elle deſcendit de ſon Chariot.

Conme la Princeſſe aimoit Perinthe, elle parla de ſon mal à Abradate au ſortir du Temple : & comme il luy dit qu’il avoit deſja fait deſſein de l’aller voir, elle luy teſmoigna qu’elle luy en ſeroit obligée : & le pria de taſcher de luy perſuader de faire quelques remedes, & de deſcouvrir la raiſon pourquoy il ſembloit eſtre reſolu de n’en faire pas : luy diſant que le reſpect qu’il avoit pour luy le porteroit peut-eſtre à faire ce qu’il ne feroit pas pour un autre. Abradate qui ne cherchoit qu’à plaire à la Princeſſe, & qui d’ailleurs regardoit Perinthe comme un honme qui avoit empeſché Panthée d’eſtre enlevée par Mexaris, ne fut pas plus toſt hors d’aveque nous, qu’il fut chez cét Amant infortuné, qui ne paſſoit que pour malade. Vous pouvez juger combien la veue de ce Prince luy donna d’émotion, & combien il eut de peine à déguiſer ſes ſentimens : auſſi toſt qu’Abradate fut aſſis au chevet de ſon lict, & que le premier conplimont fut fait, eſt il poſſible, luy dit il fort obligeanment, que lors que la Fortune ceſſe de me preſecuter, & que je ſuis ſur le point d’eſtre heureux, Perinthe veüille troubler ma joye, en me donnant la douleur d’aprendre qu’il refuſe de faire des remedes, qui le mettroient bi ? toſt en eſtat de la partager aveque moy ? Seigneur, reprit triſtement Perinthe, je