Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/208

Cette page n’a pas encore été corrigée

comme le principal deſſein d’Abradate & de Perinthe n’eſtoit que de ſauver la Princeſſe, ils n’oſerent s’enfoncer dans l’eſpaisseur de la Foreſt : de ſorte que revenant vers elle, apres avoir tué on fait fuir tout ce qui reſtoit de gens à Mexaris, elle ne les vit pas pluſtost, que les apellant ſes Liberateurs, elle leur rendit mille grâces, du ſervice qu’ils luy avoient rendu. Or comme elle avoit fort bien remarqué, qu’Abradate par ſon arrivée, avoit ſauvé la, vie à Perinthe ; elle ne le remercia pas moins de la luy avoir conſervée, que de ce qu’il eſtoit cauſe qu’elle n’eſtoit pas tombée ſous le pouvoir de Mexaris. Et comme elle ſentoit avec beaucoup de tendreſſe, tout ce que Perinthe venoit de faire pour elle, elle luy exagera la choſe, avec une reconnoiſſance extréme. D’autre part, Perinthe regardant Abradate, comme celuy qui venoit recueillir le fruit de ſes travaux, il ſe repentoit preſques de ce qu’il avoit fait : & il euſt peut-eſtre mieux aimé que Mexaris euſt enlevé la Princeſſe, que de voir qu’Abradate partageoit aveque luy la gloire de l’avoir deffenduë : & de ce qu’en ſon particulier, il luy devoit la vie.

Comme ce n’eſtoit pas un lieu fort agreable pour nous à demeurer que celuy là, où nous ne voiyons que des morts ou des mourants ; apres tous ces complimens faits en tumulte ; apres que la Princeſſe eut demande à Abradate comment il s’eſtoit trouvé là ſi à propos ? & apres qu’il luy eut apris que c’eſtoit parce qu’il avoit eſté adverty du deſſein de Mexaris, par un de ſes Domeſtiqucs ; & qu’au meſme inſtant il eſtoit monté à cheval, pour s’oppoſer à ſa violence, les Chariots marcherent : Abradate laiſſant quelques uns des ſiens pour avoir ſoin de ceux qui n’eſtoient pas encore morts, tant Amis qu’ennemis : afin de ſecourir