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paru le plus galant : je luy dirois encore, celle cy a eſté la mieux habillée : celuy là a parlé long temps à une telle ; & un tel à une autre : & luy démeſlant tous les petits intrigues de l’Aſſemblée, je ferois qu’elle sçauroit ſi exactement tout ce qui s’y ſeroit paſſé, qu’elle n’ignoreroit pas meſme qui auroient eſté celles que l’abondance des lumieres auroit fait rougir avec tant d’excés : qu’elles en auroient perdu une partie de leur beauté. Cependant vous qui eſtes Brave, venez raconter un combat, comme je le raconterois : & au lieu d’en dire toutes les circonſtances exactement, vous dittes ſeulement à la Princeſſe qui les veut sçavoir, Mexaris eſt bleſſé, & Abradate eſt Vainqueur. Il eſt vray (dit Panthée en riant de ce que Doraliſe diſoit) que je trouve que vous avez raiſon, & que Perinthe a tort : je penſois Madame, repliqua t’il, qu’il ne fuſt pas trop judicieux, de narrer un combat à des Dames, de la meſme façon qu’on le raconte à des hommes : il ne ſeroit ſans doute pas beau, reprit Doraliſe, que vous vinſſiez touſjours parler de Guerre, & de Batailles, ou conter vos propres victoires : mais pour un combat ſingulier, & un combat encore où vous n’avez point eu de part, & qui s’eſt fait entre deux Perſonnes ſi remarquables, il faloit le dire fort exactement. je m’en informeray donc mieux une autre fois, reprit il, & je profiteray de vos enſeignemens : une autre fois ! interrompit la Princeſſe, ha veüillent les Dieux que vous n’en ſoyez pas en la peine. Panthée dit cela d’un air, qui fit ſi bien voir à Perinthe ce qu’elle penſoit, qu’il en perdit la parole durant un quart d’heure : pendant lequel Doraliſe continuant de luy parler comme elle avoit commencé penſa le faire deſesperer.