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beaucoup d’averſion pour luy, j’obligeay Andramite à parler à Creſus, pour deſtourner un mariage qui ne vous plaiſoit pas. juſques là, interrompit Panthée, je vous ay beaucoup d’obligation : mais pourquoy donc en parlant au Prince mon Pere, n’agiſſez vous pas dans les meſmes ſentimens ? & pourquoy eſtes vous aupres de luy le protecteur de Mexaris ? Perinthe changea de couleur, entendant parler la Princeſſe de cette ſorte : qui voyant l’altération qui paroiſſoit dans ſes yeux, connut qu’en effet il y avoit quelque vérité à ce qu’on luy avoit dit. Touteſfois comme l’amour fait trouver des excuſes à tous les crimes qu’il fait commettre, Perinthe n’en manqua pas : ſi bien qu’apres avoir ſurmonté la premiere honte qu’il eut de ſa foibleſſe, il ſe remit aſſez pour luy reſpondre. J’advoüe Madame, luy dit il, que vos Eſpions ſont aſſez fidelles : & qu’en certaines occaſions, où le Prince voſtre Pere m’a teſmoigné eſtre fortement reſolu de vous faire eſpouser le Prince Mexaris, je ne me ſuis pas oppoſé directement à ſes intentions : & je l’ay fait d’autant pluſtost que je sçavois bien qu’il ne les pourroit pas executer. je me ſuis donc contenté, de luy perſuader autant que je l’ay pû, qu’il ne devoit pas ſonger à ſouffrir que ce Prince vous eſpousast, ſans le conſentement de Creſus, que je sçay qui ne le donnera jamais : ainſi ſans rien hazarder, je ſuis quelqueſfois tombé d’accord en luy parlant, que Mexaris eſt un Grand Prince, qui ſelon les aparences, pourra un jour eſtre Maiſtre de toute la Lydie : de ſorte Madame, que ſans prejudicier à vos intereſts, j’ay ſeulement voulu un peu meſnager les bonnes graces de mon Maiſtre : & ne m’oſter pas les moyens de vous rendre ſervice aupres de luy, ſi l’occaſion s’en preſentoit. Ce